Tandis que la situation humanitaire dans la bande de Gaza est dramatique, les femmes palestiniennes enceintes doivent vivre leur grossesse avec des suivis médicaux rendus compliqués par les déplacements d’abri en abri et les infrastructures hospitalières détruites ou rendues non fonctionnelles. Les accouchements se font dans des conditions qui dépassent l’entendement notamment avec un manque d’antalgiques en post-opératoire après les césariennes.
Porter la vie c’est également porter la mort
Le Docteur Zouhair Lahna, gynécologue obstétricien en mission avec PalMed Europe, a urgemment alerté sur la situation tragique à l’hôpital mère-enfant à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. « Les femmes accouchent dans des conditions extrêmes, puis après 24 heures, elles rejoignent des tentes de fortune afin de laisser leur place. Elles font face au froid et à une mauvaise alimentation, ce qui met en danger aussi bien leur santé que celle de leurs nouveau-nés », dit-il. Les scènes qu’il raconte sont saisissantes. « J’ai assisté à la mort d’une femme qui avait donné naissance par césarienne avec une déchirure de l’utérus. En 24 heures son état s’est dégradé. Elle est morte laissant cinq orphelins et son époux malade. » Dans la bande de Gaza, porter la vie c’est également porter la mort.

Quel lieu sûr pour cette mère ? – Capture AJ+
Des fœtus sans vie
L’hygiène et l’eau manquent cruellement. « Cela conduit à de nombreuses maladies pour la mère, le fœtus. Ces maladies peuvent apparaître après l’accouchement causant même la mort », explique le Dr Zouhair Lahna. Sur sa page Facebook, il évoque Abeer, enceinte de 7 mois et souffrant de graves complications en raison de son diabète et du manque d’insuline. « Elle est tombée dans un semi-coma, avec beaucoup de difficultés pour respirer. Le fœtus était mort et nous avons effectué une césarienne. En confiant le fœtus sans vie à l’infirmière, cette dernière a éclaté en sanglots. Plus tard, nous sommes retournés voir Abeer. Sa glycémie avait baissé mais son état s’était détérioré. Elle est décédée. Ce sont des nouvelles frustrantes qui mettent en colère. »
Des soins post-partum inexistants
L’organisation Médecins Sans Frontières alerte sur les soins post-partum. En raison d’établissements de santé surchargés, les mères sortent quelques heures à peine après avoir accouché. Les garder plus longtemps est pourtant primordial pour prévenir les complications. MSF a ajouté des lits pour renforcer la maternité de l’hôpital émirati. Les femmes enceintes qui se présentent dans cette structure souffrent souvent d’anémie ou encore d’infections génito-urinaires. D’après les chiffres des institutions de l’ONU, repris par The Lancet en janvier, le nombre de femmes enceintes est d’environ 52 000. 183 femmes accouchent chaque jour. 15% d’entre elles ont besoin de soins spécifiques.
Fausse couche, bébé mort-né, prématurité…
Les femmes enceintes et celles en post-partum souffrent de l’insécurité, du stress, de la faim… Fausse couche, bébé mort-né, prématurité, anomalies congénitales… sont autant de risques encourus. L’accès au lait maternisé, aux couches et aux vêtements pour les nouveau-nés est rendu complexe. L’urgence de la situation est documentée très largement par les professionnels de santé sur place. Les journalistes palestiniens sont aussi les seuls témoins puisqu’Israël interdit l’accès de la bande de Gaza aux journalistes étrangers. Jusqu’où ira cette tragédie avant une intervention de la communauté internationale ?
Sans cessez-le feu, sans une aide humanitaire entrant en continu dans la bande de Gaza depuis les différents points de passage et avec la menace d’une offensive sur Rafah, la situation humanitaire continuera à empirer. Les femmes enceintes et celles venant de donner naissance, avec leurs bébés, seront encore et toujours parmi les premières victimes !
Reportage de l’UNFPA, 20 février 2024

