
Chaque habitant de la bande de Gaza a une histoire à raconter. Un récit qui depuis près d’une année est fait de peur, de morts, de blessés, de tirs de snipers et de tanks, de bombardements, de déplacements d’abri en abri, de privations médicales, alimentaires… Saed, ce père de famille et amoureux du ballon rond – rencontré en décembre 2012 dans la bande de Gaza – vit ce quotidien imposé par l’armée de colonisation et d’occupation israélienne.
D’étudiant à Al Azhar à entraîneur de football
Saed est né dans le camp de réfugiés Al Shati dans la bande de Gaza. « J’ai vécu toute ma vie ici et je n’ai voyagé qu’une seule fois. C’était pour aller en Egypte pendant mes études à l’université Al Azhar qui se trouvait à Gaza », dit Saed. Il suit alors un cursus en psychologie mais doit l’interrompre en raison de difficultés financières. Du côté de ses loisirs, le football occupe une place chaque jour plus importante. « J’ai commencé à jouer assez jeune en intégrant des équipes locales. Puis cette passion m’a donné envie d’en faire ma source de revenus. Donc j’ai passé mes certificats afin d’être entraîneur de football. Grâce à cela, j’ai entraîné des équipes dans la bande de Gaza », explique Saed.
La vie avant le génocide
Avant le 7 octobre 2023, le blocus avait déjà cours dans la bande de Gaza. « La vie n’était pas facile mais cela me suffisait. Je vivais dans le camp Al-Shati dans la maison familiale. Au sein de l’académie Al Wehda, j’entraînais les enfants et j’ai aussi été entraîneur du club local de Namaa », raconte le Gazaoui. À ses côtés, son épouse Shorouq est diplômée en e-business, sa fille aînée Sila débutait sa première année d’école primaire. « Elle était heureuse mais elle a été privée de rentrée scolaire. Ma deuxième fille Mira était en maternelle et mon fils Osama avait un peu plus d’1 an. À présent, ils ont respectivement 7, 6 et 2 ans », présente-t-il. À l’époque, il construisait sa maison et aujourd’hui tout est parti en fumée.

Déplacé de Gaza City à Rafah puis Deir Al-Balah
« Pour être honnête, je suis l’une des personnes les plus chanceuses. Avec ma famille, nous n’avons changé d’abri que deux fois. Nous avons évacué la ville de Gaza pour aller à Rafah, puis vers Deir Al-Balah, où nous sommes actuellement », relate Saed. A Deir Al-Balah, tous vivent dans la maison de son cousin. Ce lieu a été transformé en grand refuge puisque la cousine de Saed y est aussi installée avec tous ses frères et sœurs – qui sont mariés – et leurs familles respectives. « Il y a aussi certains des beaux-parents avec nous. Nous sommes nombreux et vivons tous à l’intérieur de la maison. Cela représente environ cent personnes et l’endroit est devenu exigu pour avoir de l’intimité », dit Saed.
Des enfants apeurés à chaque bombardement
Des membres de la famille de Shorouq ont aussi rejoint Saed dans leur abri à Deir Al-Balah. « Je fais tout mon possible pour faire oublier la guerre à mes enfants. Mais à chaque fois que je réussis, une forte explosion vient tout détruire », dénonce Saed. Le père de famille a pris l’habitude de divertir Sila, Mira et Osama. Il les emmène au bord de la plage mais aussi au marché et les distrait en empruntant les charrettes tirées par des animaux. « Nous jouons dans notre abri quand nous ne sortons pas. C’est tout ce que je peux faire pour leur remonter le moral et qu’ils restent positifs. Cependant à chaque détonation, à chaque coup de feu, je ne peux que serrer mes enfants contre moi. Ils se bouchent les oreilles et nous prions Dieu avec ce sentiment d’impuissance », décrit Saed.
Aujourd’hui, le temps passé sur les terrains de football est bien loin pour Saed, bien qu’il observe parfois les enfants jouer au ballon rond dans les rues. A présent, il partage régulièrement le contenu de ses journées et l’actualité dans la bande de Gaza sur son compte saed.abo.fares21. Enfin, comme des milliers de Palestiniens dans la bande de Gaza, il a créé une cagnotte sur GoFundMe afin de se rendre en Egypte lorsque les conditions le permettront. En voici le lien :
