Ce mardi 1er janvier est férié en France. Pour nous, il signifie le départ de Gaza City, de la Bande de Gaza et de la Palestine. Et nous en aller est difficile. Parce que nous nous sommes habitués aux lieux. Nous nous sommes attachés aux gens. Nous avons conscience de ne pas être venus en vacances même si la Mer Méditerranée est si belle ici et que le temps est si magnifique, malgré l’hiver en Europe, d’où nous venons. La Palestine nous a accueillis en nous ouvrant les bras. Nous, partisans de la cause palestinienne et amoureux de la liberté. Nous, habitués des tentatives pour venir ici ou simplement novices de la première fois.
Ne pas taire la situation en Palestine
Ce mardi matin, le réveil est rude parce que nous rangeons nos affaires et fermons les portes de nos chambres pour la dernière fois. Il n’y aura pas de visite aujourd’hui. Nous n’irons pas à nouveau à la découverte d’autres injustices. Nous ne croiserons pas d’autres visages marquants. Nous n’entendrons pas d’autres témoignages poignants. Ce soir, nous ne rentrerons pas à l’hôtel malheureusement. Ce soir, nous serons loin. Peut être encore au Caire ou alors déjà à l’aéroport afin de rejoindre l’Europe. Avec la conviction que la meilleure des armes est de ne pas taire la situation en Palestine. Ce mardi matin, tout le monde doit être sur le pont pour repartir. Rejoindre Rafah. Passer du côté palestinien au côté égyptien. Quitter un monde bâillonné et sous surveillance permanente pour une autre planète. Ces jours à Gaza ont filé à la vitesse de la lumière. Il est tellement compliqué de s’imaginer devoir se réveiller ailleurs mercredi matin. Avec une autre ambiance. D’autres gens. D’autres préoccupations. Sans penser à l’eau contaminée du robinet. Sans entendre de bruits de générateurs…
La Bande de Gaza n’est pas paria
Forcément, en reprenant notre quotidien, on ne pourra s’empêcher de mettre la Palestine dans nos conversations. Et bizarrement ou alors évidemment, entre anciens membres de cette Mission Bienvenue en Palestine, nos impressions seront les mêmes.
Nos sentiments seront les mêmes. Notre manque et notre envie de revenir au plus vite également. De retour chez nous, il nous faudra raconter les choses vues, les émotions vécues… Mais cela signifie trouver les bons mots, tous ces mots pris en otage, sous blocus, en Palestine. Ce qui prouve qu’il faut y mettre les pieds pour pouvoir en témoigner. Certains diront que nous sommes fous d’avoir risqué des bombardements pour nous rendre sur place. Quelles explications trouver pour se justifier ? Qu’aujourd’hui, une population est opprimée par un pays qui se dit être une démocratie ? Que nous avions envie de prouver qu’on pouvait aller en Palestine, avec trois bus et près de cent militants ? Ou tout simplement répondre que la Palestine n’est pas une zone interdite. Que l’une de ses régions, la Bande de Gaza, n’est pas paria et que des hommes et femmes y vivent. Sans oublier d’insister sur le fait que les médias qui occupent le plus de place sont adeptes du mensonge, du silence et ne montrent pas la vérité… Nombreuses pourraient être les raisons… Si nombreuses !
Les yeux fermés d’avoir trop pleuré. Les esprits ailleurs, à Gaza…
Alors ce mardi 1er janvier, en quittant la Palestine, le cœur est en larmes. Les yeux s’expriment pour lui et sont inconsolables. Les sept heures pour rejoindre Le Caire ont été d’une durée interminable, sans chant, sans bruit. Les yeux fermés d’avoir trop pleuré. Les esprits ailleurs, à Gaza… En arrivant au Caire, chacun prend son chemin. Certains sont encore sur place pour quelques jours, d’autres doivent reprendre des vols ce soir déjà. La capitale égyptienne se souvient de nous, lorsqu’il y a plus d’une semaine, nous étions là, nous préparant à voir la Palestine. Mais, ce mardi soir, dans un hôtel tout près de la Place Tahrir, l’esprit n’a qu’une envie, se poser sur l’oreiller et remettre ses idées en place. Afin d’imaginer comment continuer cet engagement pris en mettant les pieds à Gaza, comment participer activement à dénoncer l’oppression israélienne une fois le quotidien repris et de quelle manière raconter cette mission sur le blog, dans la rubrique Une Plume dans la Bande de Gaza…
Amir, Gwen et Shaheen et leurs sentiments
En allant en Palestine, à l’Encre de ma Plume a pu revoir Amir qui avait tant partagé durant l’opération Pilier de Défense… Pour Amir, ces instants passés à nos côtés sont « des moments inoubliables, avec beaucoup d’émotion. Cela fait longtemps que Gaza n’a pas eu une délégation pareille sur son sol. C’est important que le peuple gazaoui enfermé, sous blocus, sache qu’il y a de la solidarité dans le monde et qu’il n’est pas tout seul dans son combat. C’est toujours un bonheur pour Gaza de recevoir des amis du monde entier. »
Gwen a été une des participantes. « Mon coeur est triste d’avoir dû quitter cette terre et sa population si chaleureuse. Peut être que je n’aurai plus jamais la chance d’y retourner et de revoir toutes ces personnes. » Mais un refrain reste dans sa tête : « La Palestine vivra et vaincra. » Un jour, venir à Gaza sera aussi simple que d’aller à Marrakech ! « Ces jours sur place ont rechargé mes batteries et j’ai la certitude que je n’arrêterai pas de me battre pour la Palestine. Les Palestiniens voient beaucoup d’espoir à travers nous. Etre à leurs côtés est une vraie victoire pour nous mais aussi pour eux. »
Le discours de Shaheen est le même. « De l’émotion, de jolies rencontres. Sans oublier que la Palestine est une terre sainte et qu’il y a ce sentiment fort lorsqu’on y met les pieds ». De ce voyage, elle est revenue avec de la tristesse et de la colère, face à tant d’injustices. « Les Palestiniens restent dignes et gardent la tête haute. Ils sont une vraie leçon de vie ! Alors forcément le retour est très dur. Aujourd’hui je n’ai qu’une hâte c’est d’y retourner. Mes convictions sont encore plus fortes ! Et lorsque je lis que la Bande de Gaza est à nouveau sous les bombes, je repense à ces gens rencontrés. Je sais qu’ils ne sont pas en sécurité. » Shaheen reste persuadée qu’un jour la Palestine sera libérée. « Si je ne vois pas ça. Ma descendance en sera peut-être témoin et verra ces Palestiniens courageux qui ont beaucoup à nous apprendre ! »
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Voilà comment prend fin la chronique de ces jours passés en Palestine. Pour lire ou relire les épisodes, n’hésitez pas à cliquer sur les liens ci-dessous :
Welcome to Egypt and Merry Christmas
Les Pyramides, la Place Tahrir…
Palestine, on te chante ce soir au Caire…
Sur la route de Rafah
De l’hôpital Al Shifa jusqu’à Beit Hanoun, la tristesse et les sourires
Des écoliers Palestiniens jusqu’aux étoiles de la Bande de Gaza
Les pêcheurs, l’eau et la musique face aux F16 israéliens…
Les agriculteurs, les footballeurs et un jour de l’An à Gaza
Au revoir Gaza, à très bientôt Palestine !
Régulièrement, le blog publie des nouvelles de Gaza. Restez connectés ! Palestinement vôtre…